top of page

La forêt de Pointe-du-Buisson

Dernière mise à jour : 21 mai 2020

Musée québécois d'archéologie

 

Depuis maintenant 50 ans, Pointe-du-Buisson, Musée québécois d’archéologie est un lieu vivant d’échanges, de savoirs et de références qui permet l’avancement des sciences, plus particulièrement de l’archéologie. Le musée, de par sa collection et son site unique, ses expositions, son programme de prêt, ses programmes éducatifs et sa volonté de conservation est aussi porteur de rayonnement du patrimoine culturel permettant ainsi, auprès de la collectivité, l’éveil d’un sentiment de fierté et d’identité.

 

En 1975, Pointe-du-Buisson est désignée comme site archéologique classé par le ministère des Affaires culturelles du Québec. Ce lieu se voit aussi attribuer, en 2004, la mention de Trésor culturel par les membres du conseil de la culture de la MRC de Beauharnois-Salaberry. L’institution est, en 2006, désignée lieu historique national du Canada par la Commission des lieux et monuments historiques nationaux. Plus récemment, le site est identifié, depuis 2014, comme une zone de conservation dans le plan de développement de la Ville de Beauharnois.

Situation géographique

Pointe-du-Buisson, Musée québécois d’archéologie est localisé dans les basses terres centrales du Saint Laurent et est inclus dans le bassin hydrographique de la rivière Châteauguay à une cinquantaine de kilomètres en amont de Montréal. Cette zone, située en bordure du fleuve à l’extrémité est du couloir reliant les lacs Saint Louis et Saint François, est adjacente au côté sud du barrage d’Hydro-Québec.

Caractéristiques physiques

L’assise du lieu est constituée par un affleurement rocheux sédimentaire légèrement métamorphisé et recouvert d’un terreau limono-argileux faiblement acide qui supporte, probablement depuis au moins quarante siècles, une érablière à caryer.

L’unité pédologique qui caractérise le lieu est constituée d’alluvions marines champlainiennes formées d’argile non-calcaire recouvrant la roche-mère. Clermont et Chapdelaine (1) signalent qu’entre 7 500 et 6 000 ans AA., les eaux des grands lacs post-glaciaires de la région de Montréal (lac Saint-Barthélémi) se sont retirées et la végétation a progressivement colonisé le territoire. Dès 6 000 ans AA., la forêt caduque fait son apparition et Pointe-du-Buisson devient peu à peu ce qu’elle est actuellement. Pointe-du-Buisson appartient à la zone de l’érablière sucrière à Caryer cordiforme (2). Il s’agit d’un véritable vestige de la forêt qui prévalait dans la plaine de Montréal avant le développement urbain et industriel.


Ce peuplement forestier demeure unique par sa composition riche et variée en espèces floristiques et forestières. Parmi les espèces dominantes, l’inventaire forestier réalisé en 2011 a révèlé que l’érable à sucre (Acer sacharrum) et le chêne rouge (Quercus rubra) composent 52 % de la surface terrière du peuplement. Le caryer ovale (Carya ovata) s’illustre avec tout de même, plus de 17 % loin devant l’érable rouge (Acer rubrum) 9,2 %, les frênes d’Amérique (Fraxinus americana) 5,8 % et de Pensylvanie (Fraxi- nus pennsylvanica) 3,3 % ainsi que l’orme d’Amérique (Ulmus americana) 5,3 %. On retrouve également plusieurs individus de hêtre à grandes feuilles (Fagus grandifolia), d’ostryer de Virginie (Ostrya virginiana) de tilleul d’Amérique (Tilia americana), d’érable argenté (Acer sacharrinum) et de peuplier deltoïde (Populus deltoides).

Fait singulier, on estime qu’environ 7 % des tiges, particulièrement chez le chêne rouge et les frênes, atteignent des diamètres de plus de 80 cm et une hauteur dépassant les 22 mètres. Dans cette forêt de structure inéquienne on a pu constater que plusieurs individus dépassent les 120 ans... Certains pourraient être même bicentenaires! Cette caractéristique couplée à la présence marquée du caryer ovale, une espèce considérée vulnérable ou susceptible de l’être, en fait un lieu de choix pour la conservation. Qui plus est, la noix douce du caryer ovale est très prisée des amateurs de noix comestibles puisque sa saveur est sans pareil, meilleure que la pacane selon plusieurs. La forêt de Pointe-du-Buisson est particulièrement dense. Les rares perturbations naturelles passées et le faible taux d’intervention sur le couvert forestier permettent de maintenir une couverture de la canopée qui projette son ombre au sol à plus de 80 %. Les quelques ouvertures principalement causées par la chute naturelle d’un arbre en déclin ou mort assure l’installation d’une régénération naturelle riche avec des espèces qui maintiennent une relative stabilité de la composition du peuplement.

Au niveau floristique, la diversité des strates arbustives et herbacées est typique des érablières à caryer. On y rescense au moins une vingtaine d’espèces. L’actée rouge (Actaea rubra) prédomine en occurrence et en nombre. La strate arbustive, quant à elle, est caractérisée par la présence de noisetier à long bec (Corylus cornuta). La régénération d’espèces arborescentes identifiées précédemment au stade de gaulis est bien représentée et bien distribuée sur l’ensemble de la superficie.

Par son âge vénérable et le faible taux d’intervention humaine, cette forêt témoigne de la stabilité que peut atteindre un écotype du domaine de l’érablière à caryer à son stade climacique. Avec une structure presque idéale, la pérennité de cet écosystème est assurée par la nature même de la vocation du musée.


Caractéristiques archéologiques


Bordée de rapides impossibles à franchir en bateau, la Pointe-du-Buisson était un lieu très fréquentée à la période pré-contact par les populations autochtones qui devaient y faire du portage. Lieu de courtes haltes, campements estivaux, site de pêche puis lieu de villégiature, Pointe-du-Buisson accueille les groupes humains depuis 5 000 ans. À ce jour, près de 20 sites archéologiques sont répertoriés, et plus de deux millions d’artefacts ont été collectés.

Au fil des ans, Pointe-du-Buisson devient l’un des sites les mieux documentés au Québec et un lieu clé pour la compréhension de la préhistoire du nord-est américain. Riche en artefacts et en écofacts, le sol de la Pointe-du-Buisson révèle l’histoire culturelle des peuples qui ont vécu dans la région du Haut Saint Laurent au cours des cinq derniers millénaires. Après 50 ans de fouilles archéologiques systématiques ayant permis de mettre au jour plus de 2 millions de pièces, à peine 3 % de la surface du site a été explorée.

Mise en valeur du site


En 2016, l’équipe du musée observe une dégradation ponctuelle du réseau de sentiers pédestres et une accentuation de l’érosion d’un ruisseau secondaire à proximité du pavillon principal. Suite à ce constat, la direction met en œuvre un plan d’action d’urgence qui vise à freiner l’important phénomène de dépérissement du lieu et de ses infrastructures de visite afin de stabiliser et maintenir son intégrité physique.


On décide rapidement de sécuriser le parcours en abattant et en récupérant un peu moins de 80 arbres dangereux en bordure de sentiers. À l’été 2017, on restaure le réseau de sentiers sur près de 2 kilomètres, on ajoute 2 belvédères donnant vue sur le fleuve et près de 400 mètres de passerelles en bois surplombant les zones à drainage sensible. On comble plusieurs tronçons entre les passerelles de copeaux de pruche pour limiter l’érosion du sol. Le projet permet également de favoriser une plus grande compréhension des spécificités du site liées aux différents phénomènes d’érosion et d’identifier les enjeux de conservation du site et leur planification adéquate en fonction des différents biotopes.


Ces actions prioritaires de conservation permettront de poursuivre la mise en valeur des patrimoines archéologique et naturel du lieu et de ses ressources, et ce, dans un processus d’exploitation et de gestion écoresponsable. Cette volonté de préservation et de conservation vise à prévenir la perte et la dégradation d’habitats de grande valeur écologique tel que l’érablière à caryers ovales.


Le musée attire plus de 2 000 visiteurs par années et souhaite ajouter à ses programmes d’animation des activités de sensibilisation à la fragilité de cet écosystème exceptionnel. Il est possible de visiter le site et ses expositions de mai à novembre.


PAR CAROLINE NANTEL, directrice du musée Pointe-du-Buisson ET BENOIT MICHAUD, technicien forestier


Pour en savoir plus Visitez le www.pointedubuisson.com

Bibliographie (1) 1982 Pointe-du-Buisson 4, quarante siècles d’archives oubliées, monographie de Recherches amérindiennes au Québec (2) 1966 Grandtner, m. M. La végétation forestière du Québec méridional, Les Presses de l’Université Laval

8 vues

Posts récents

Voir tout
bottom of page