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La mobilisation des bois

Dernière mise à jour : 21 mai 2020

Par Benoit Michaud, technicien forestier, président de l’Association forestière de Lanaudière

Nous sommes maintenant en période de renaissance des marchés pour tous les produits de bois ronds disponible. Dans cette foulée,le gouvernement du Québec vient tout juste d’insuffler un nouveau levier financier pour stimuler les mises en chantiers de récoltes de bois destinés à l’industrie forestière tout en soutenant les producteurs engagés dans l’aménagement durable des forêts. 


Pour répondre à l’intention du ministre de passer de 5,2 millions de m3 de bois à 6,4 millions de m3 de bois par année à l’échelle provinciale en 2018, les défis pour les producteurs forestiers des régions au sud du Québec seront particulièrement importants.  En injectant un nouveau 12 millions de$ sur deux ans, cette somme viserait à passer de près de 12 000 hectares à environ 18 000 hectares de travaux commerciaux par année financés par les programmes de mise en valeur. Dès 2016-2017,en soutenant efficacement des opérations de récoltes durables en forêts privées, l’objectif du ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs (MFFP) est d’accroître la production de bois d’un million de mètres cubes supplémentaires pour créer davantage de richesses dans les régions. Pour y parvenir, le programme de remboursement de taxes foncières devra faire aussi partie de l’équation. Aussi, chaque agence régionale de mise en valeur des forêts privées et leurs partenaires auront des défis mesurables à relever rapidement. Dans les régions limitrophes à Montréal notamment, la possibilité forestière s’est accrue au fil de la dernière décennie. Par des coupes partielles prescrites et bien dirigées,il apparaît possible d’augmenter sensiblement la récolte de bois sans affecter le paysage ou la perte de superficies productives. D’autant plus que moins de 40% de la possi­ bilité forestière des feuillus en forêt privée est récoltée annuellement à l’échelle provinciale. La région de Lanaudière ne récolterait pas plus de 18 % de sa possibilité dont seulement 5 % des volumes seraient actuellement livrés aux industriels forestiers. Un piètre score en partie résultant de l’effondrement des marchés en 2008-2009, une main­ d’œuvre disparue et un morcellement de propriétés forestières de plus en plus prisées par une clientèle de villégiature. Rappelons que le plaisir de posséder un milieu naturel (92 %) et le plaisir d’aménager une forêt (84 %) sont les principales motivations pour posséder un lopin boisé.


Communiquer les avantages de la récolte de bois


Un effort soutenu sur le recrutement de superficies propres à la récolte est actuellement en cours dans la plupart des régions du sud de la province. La création de groupes d’intervenants régionaux permettra d’optimiser les énergies à déployer. Un plan d’action provincial et issu du Forum des partenaires de la forêt privée sera d’ailleurs déposé à l’automne par le MFFP. Il est à parier qu’une meilleure coordination de la sensibilisation des propriétaires forestiers aux bienfaits de la récolte par l’aménagement durable des forêts demeurera un enjeu récurant pour répondre à la douce reprise qui s’amorce. Ce rôle de communication pourrait être en partie dévolu aux agences, mais devrait être couplé à la mission des associations forestières régionales. Les conseillers forestiers accrédités, premiers répondants auprès des propriétaires, devront participer à l’atteinte de ces objectifs. L’industrie peut aussi jouer un rôle actif dans son intérêt pour obtenir plus de volumes de bois en se joignant aux efforts de la Fédération des producteurs forestiers du Québec et des syndicats pour stimuler le message auprès des propriétaires. Les MRC devront miser sur une meilleure harmonisation des règlements municipaux au sein de leur territoire afin d’éviter des abus réglementaires dans certains cas autant qu’une part de laxisme incohérent dans d’autres municipalités. Leur contribution à promouvoir de saines pratiques forestières pourrait favoriser un rapprochement des intervenants.


À terme cependant,certains défis demeureront dans la mire de la réalisation des objectifs d’une mise en marché accrue.


L’entrepreneur-sylviculteur, métier d’avenir


Une relève de la main-d’œuvre reste à former et soutenir. Rapidement, il faut une stratégie plus ambitieuse pour rendre attrayants les métiers de la forêt. Les régions manquent déjà de main-d’œuvre compétente en matière de récolte mécanisée. Répétons-le, nous sommes dorénavant passés du métier de défricheur-bûcheron à celui d’entrepreneur-sylviculteur. Le public doit le reconnaître. Les écoles forestières professionnelles doivent être mises plus en évidence pour attirer davantage de candidats à devenir des sylviculteurs certifiés.


Le transport du bois, un maillon faible à renforcir


La structure industrielle de première trans- formation de bois rond inégale entre les régions et l’ouverture à une consommation plus importante de la part de certains acheteurs invitent à structurer une meilleure coordination du transport forestier au sein des territoires visés par les plans conjoints ainsi qu’entre ces territoires. La réalité des opérations forestières autour des axes urbains comme Gatineau, Montréal, Trois- Rivières, Sherbrooke ou Québec nécessite une flotte de transporteurs adaptée à des superficies relativement petites et contraintes à des impératifs réglementaires qui réduisent souvent les lieux de charge- ment à leur plus simple expression. Les véhicules munis d’auto-chargeuse, souvent articulée, demeurent une option efficace, mais deviennent marginalisés par des taux de transport peu attrayants pour leurs propriétaires. Plusieurs disparaissent du paysage forestier ou sont désuets pour répondre aux nouvelles directives du MTQ. Avec l’ajout de volumes destinés aux industriels forestiers, il deviendra de plus en plus difficile d’assurer une fluidité et une constance des livraisons si aucun rapprochement plus substantiel n’est accordé pour structurer ce maillon faible de la chaîne de productivité. Un effort constant devra être investi à court terme parmi l’industrie, les syndicats de producteurs et les transporteurs eux-mêmes pour stabiliser une nouvelle flotte de véhicules desservant les forêts privées et surtout améliorer la rentabilité entre les lieux de chargement et de destination.


Afin de stimuler la reprise des livraisons de bois et d’intéresser davantage de propriétaires forestiers à participer à l’activité économique régionale, d’autres mesures fiscales ont été récemment apportées en plus de la bonification de 12 millions de $ sur deux ans au programme de mise en valeur des forêts privées. Notons particulièrement :

  • une hausse à 65 000 $ du seuil d’exemption de la taxe sur les opérations fores- tières;

  • une bonification du remboursement des taxes foncières accordée aux producteurs forestiers par l’introduction d’un mécanisme annuel d’indexation;

  • un étalement du revenu pour les producteurs forestiers.


Ces ajustements sont d’autant de bonnes nouvelles résultant de quelques-unes des recommandations du rapport Belley au Rendez-vous sur la forêt privée de 2011. Bien que le défi reste grand, il est à souhaiter que tous les intervenants saisiront l’opportunité de mettre l’épaule à la roue pour accroître la part de la forêt privée dans les approvisionnements de l’industrie à moyen terme.

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