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Le sapin est-il roi des forêts?


La tradition du sapin de Noël, étant nommé le roi des forêts, est d’origine allemande. Au départ, il n’y avait pas d’espèce résineuse prisée en particulier, ce geste était principalement un signe de vénération et de préservation de la nature qui apportait une touche de verdure dans la maisonnée. Au Québec, c’est le sapin baumier qui fut choisi, probablement de par son aire de distribution qui est très étendue au Québec, mais également pour le baume qu’il apporte et le fait qu’il mette du temps à perdre ses aiguilles une fois coupé.


Malgré toutes ses qualités pour l’intégrer à ces festivités, si nous avions à choisir le roi des forêts au niveau sylvicole, le sapin ne serait probablement pas bon premier compte tenu de ses vulnérabilités.


Vulnérabilités


Bien qu’il ait la capacité de croître dans une variété de milieux, le sapin sera de meilleure qualité dans les sites suffisamment humides et frais. Il est en effet sensible aux extrêmes de chaleur et sécheresses, ce qui en fait une espèce qui est susceptible d’être moins résiliente face aux changements climatiques.


En fait, ailleurs que dans son habitat optimal, son bois sera bien souvent affecté par un champignon de carie dès qu’il aura atteint environ 8 pouces (20cm) de diamètre à hauteur de poitrine (1,30 m). Ce champignon en dégradant le bois le rendra ainsi fibreux et inutilisable en plus d’affecter son état de santé, mais également sa résistance mécanique lors de période de grands vents et de neiges lourdes. Son système racinaire très en surface le rend également fort vulnérable à ces aléas climatiques, provoquant régulièrement la chute d’un ou plusieurs arbres qu’on qualifie de chablis.


Comme si ce n’était pas suffisant, il est une espèce prisée par plusieurs autres prédateurs, tels les cervidés qui s’en nourrissent à son jeune stade ou la tordeuse des bourgeons de l’épinette qui fait d’énormes ravages de manière cyclique chez cette espèce. La tordeuse ne fut pas encore détectée dans Lanaudière, mais elle s’en rapproche. Des foyers d’infestation furent d’ailleurs détectés à Sainte-Adèle, dans les Laurentides, ainsi qu’à Saint-Élie-de-Caxton, en Mauricie. (Évolution de l'épidémie de la tordeuse des bourgeons de l'épinette - Fédération des producteurs forestiers du Québec (foretprivee.ca)).


Le sapin a une longévité relativement faible comparativement à d’autres et est plutôt une espèce de transition (ex.: vieille friche, coupe) ou espèce compagne au sud du Québec, tandis qu’il peut être stable et dominant plus au nord.


Aménagement


En peuplement forestier mixte, sous un régime de coupe partielle, les plus gros sujets d’environ 40 ans et plus seront prioritairement prélevés afin de faire place à des arbres plus vigoureux et ayant une meilleure espérance de vie.


En peuplement feuillu, sa rareté fera en sorte qu’on pourra le préserver en partie pour la biodiversité, comme source de nourriture ou parce que son couvert crée d’excellents abris fauniques.


En peuplement pur, dépendamment de la structure d’âge du peuplement forestier, il pourra être traité en coupe partielle ou en coupe sévère si tous les arbres deviennent à maturité en même temps. Afin de diversifier la composition de ces forêts, un reboisement, un enrichissement ou un dégagement d’espèces variées peuvent faire partie des outils proposés.


Si vous avez des forêts composées de sapins sur votre propriété, vous pouvez consulter votre conseiller forestier afin de connaître leurs potentiels d’aménagement.


Usages


Heureusement son abondance, de par sa capacité à bien se régénérer, et sa qualité pour en faire du bois de construction font en sorte que plusieurs scieries au Québec ont pu se spécialiser pour être en mesure de transformer de manière optimale ce bois. Dans Lanaudière on y trouve un chef de file, soit l’usine Crête à Chertsey qui est certifiée FSC et développe des procédés et produits innovants.


Plusieurs autres usages du sapin provenant de savoirs ancestraux sont encore utilisés aujourd’hui telles les huiles essentielles à base d’aiguilles, la gomme de sapin sous forme de capsule et même sous forme de produit forestier comestible qui est un secteur en effervescence.


Au final, le sapin est une espèce qui malgré sa vulnérabilité a toujours fait partie de nos paysages et de nos usages, il s’agit de bien savoir l’aménager et le valoriser.



Par: Julie Venne, ingénieure forestière

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