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Séquestration de carbone forestier: une avenue pour les propriétaires fonciers

Dernière mise à jour : 13 avr. 2022

1er février 2022


Nous savons que les forêts agissent comme de puissants capteurs ou émetteurs de carbone et les superficies qu’elles occupent au Québec et dans tout le pays contribuent grandement à l’équilibre climatique planétaire. D’un côté, les arbres emmagasinent du carbone pendant leur croissance. De l’autre, ils émettent du carbone lorsqu’ils meurent et se décomposent à la suite de la sénescence, de vents violents, d’un incendie ou d’une épidémie d’insectes. Pour contrer la perte de stockage causée par ces facteurs naturels et voir même accélérer le volume stocké, le reboisement de parcelles non forestières peut s’avérer un moyen efficace. À travers le monde, la déforestation doit être ralentie, voire renversée. C’est une tâche colossale.


À l’échelle du Québec, pays forestier, il peut paraître négligeable de considérer une augmentation de superficies boisées sur le plan du bilan carbone. Le territoire forestier, malgré les activités de récolte, se régénère naturellement la plupart du temps. La sylviculture, en forêt publique comme en forêt privée, améliore la résistance des peuplements aux perturbations naturelles et améliore la capacité de stockage du carbone. De ce point de vue, le bilan de stockage de CO2 dans nos forêts devrait être accru, sinon maintenu.


Toutefois, à l’échelle du territoire habité, essentiellement en territoire privé, chaque hectare de forêt conservé ou perdu devient un enjeu de société. À l’échelle de chaque MRC, le taux de boisement sert de jalon pour améliorer la qualité de vie des communautés. Dans les agglomérations de plus en plus densifiées, les dernières décennies ont accentué des pertes de superficies forestières. Mais dans plusieurs régions du Québec, le taux de boisement a augmenté depuis la deuxième moitié du XXe siècle. L’agriculture extensive et de subsistance dans de nombreux villages a laissé place à des forêts colonisant à nouveau l’espace rural. Les activités de reboisement ont en partie contribué à accroître le nombre d’hectares de forêts. Certes, les meilleures terres arables sont conservées pour une agriculture intensive et l’étalement urbain donne lieu à des déboisements récents qui laissent à réfléchir. Toutefois, à l’échelle du Québec sur les terrains privés, il y a eu des gains depuis le début de notre siècle. Les superficies forestières productives, situées sur des pentes accessibles de moins de 40% sont passées entre 1999 et 2019 de 65 996 à 67 960 kilomètres carrés, soit une légère augmentation de près de 3%. (1)


Alors, pourquoi devrait-on s’intéresser au stockage du carbone forestier au Québec?


Dans nos stratégies sylvicoles, le raffinement de nos connaissances du territoire nous amène à réfléchir aux meilleures utilisations des sols en considérant d’autres bénéfices que les biens de consommation. En forêt privée, ces bénéfices sont souvent complémentaires. La beauté des paysages, le maintien d’une biodiversité essentielle à l’équilibre des écosystèmes, la régulation du cycle de l’eau diminuant les risques d’érosions éolienne et terrestre sont quelques-uns de ces écobénéfices que procurent les forêts. Dans un contexte d’accroissement de la population, la séquestration du carbone atmosphérique devient un élément de plus en plus évident pour mieux s’adapter aux risques de changements climatiques.


Il existe des initiatives de séquestration du carbone forestier par le boisement de superficies non forestières qui se traduisent en crédits compensatoires (2) pour les grandes industries émettrices de CO2. Pour l’instant, ce sont des compensations volontaires structurées par des organisations privées ou à but non lucratif. Par ailleurs, les forestiers, citoyens et chercheurs sur les changements climatiques pressent nos gouvernements à offrir un cadre légal et fiable qui permettra de mesurer l’impact et la valeur de ces gains sur le plan économique et environnemental. La bourse du carbone, à laquelle s’est inscrit le Québec avec la Californie, peut créer un levier dynamique et attrayant pour le secteur de la sylviculture d’ici.


D’ailleurs, un projet de règlement visant la séquestration du carbone par le boisement ou le reboisement sur les terres du domaine privé au Québec a été élaboré par le ministère de l’Environnement et de la Lutte aux Changements climatiques (MELCC) en collaboration avec le ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs (MFFP). Déposé en 2021, il a fait l’objet de consultations publiques à l’automne dernier. Le gouvernement du Québec planche actuellement sur une nouvelle mouture de ce projet pour le rendre à la fois financièrement intéressant pour les propriétaires forestiers et efficace au niveau de son administration et de sa gestion.


Au cours des prochains mois, nous tenterons de vulgariser le rôle de la séquestration du carbone par la sylviculture pour mieux outiller les propriétaires dans leur décision à participer volontairement à la lutte aux changements climatiques par l’aménagement des forêts et aux projets adaptés de reboisement qui pourront y contribuer. Aussi, nous aborderons les leviers actuels qui permettent et les avenues qui permettront sous peu aux propriétaires forestiers d’additionner des gains tant au niveau environnemental que financier.



Par: Benoit Michaud, technicien forestier



(1)


(2)

Qu’est-ce qu’un crédit compensatoire? Un crédit compensatoire correspond à une quantité de gaz à effet de serre (GES) non émise ou retirée de l’atmosphère et représente une tonne métrique en équivalent CO2.




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